Baux commerciaux : clause d'indexation réputée non écrite et protocole
Publié le :
14/06/2024
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Cour de cassation, 3eme chambre civile, 16 mai 2024, n° 22-19.830
La clause d’indexation réputée non écrite au sein des baux commerciaux a fait couler beaucoup d’encre.
Ce sujet a commencé à intéresser bailleurs et locataires lorsque pour la première fois au cours du premier trimestre 2009, l’indice des loyers commerciaux a connu une baisse.
C’est à la fin de l’année 2011 que la situation s’est rétablie, et elle était due à la crise financière de 2008 qui a traumatisé les bailleurs et leurs conseils.
Depuis cette date, seule l’année 2020 a fait connaître une autre baisse de l’indexation des loyers due à l’épidémie Covid-19.
Cependant, traumatisés par l’année 2009, les rédacteurs des baux commerciaux ont imaginé rédiger des clauses d’indexation annuelle de loyer permettant uniquement une indexation du loyer à la hausse, neutralisant toute possibilité d’indexation à la baisse.
C’est et ce fut le ton qui a occupé la Cour de cassation pendant une dizaine d’années, jusqu’à un arrêt du 14 janvier 2016 où la Cour de cassation a posé le principe selon lequel une clause d’indexation qui exclut la réciprocité de la variation et stipule que le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse doit être réputée non écrite.
Les conséquences sont sévères pour le bailleur qui doit restituer le montant des augmentations encaissées durant les 5 dernières années, délai de la prescription.
L’évolution de la Cour de cassation l’a amenée à considérer et à valider le raisonnement consistant à considérer que seule la stipulation prohibée devait être réputée non écrite et non l’ensemble de la clause d’indexation.
Ainsi, une clause qui ne prévoit une indexation qu’à la hausse sans prévoir la baisse sera réputée non écrite, mais la clause d’indexation en elle-même pourra avoir ses effets.
Dans la présente affaire, il s’agit d’analyser les conséquences d’un bail ayant été résilié et ayant fait l’objet d’un protocole d’accord transactionnel, alors qu’il contenait une clause d’indexation réputée non écrite qui avait sans doute échappé à la sagacité du preneur.
Dans un premier temps, la Cour d’appel de VERSAILLES, dans un arrêt du 7 avril 2022, a considéré que les parties ayant signé un protocole d’accord transactionnel portant notamment sur la résiliation du bail avec le versement d’une indemnité transactionnelle et la signature d’un nouveau bail, il n’était plus possible de revenir sur le protocole transactionnel et l’ancien bail qui contenait une clause d’indexation non écrite compte tenu de l’autorité de la chose jugée de la transaction.
Le locataire a contesté cet arrêt en estimant qu’une clause réputée non écrite était insusceptible de toute renonciation comme de toute confirmation ou ratification et qu’il était impossible par une transaction d’écarter la rétroactivité des restitutions (des augmentations) qui s’attache à cette sanction par la conclusion d’une transaction.
En clair, une transaction ne peut pas valider une clause réputée non écrite.
Comme les parties ont régularisé un nouveau bail avec une clause parfaitement valable, le locataire a estimé que la conclusion d’une transaction ne pouvait pas purger la clause d’indexation de son illicéité pour l’avenir seulement.
En clair, il ne serait pas possible de renoncer à une demande de restitution sur la base d’une clause réputée non écrite quand bien même une transaction aurait été régularisée.
La Cour de cassation apporte à cette argumentation une réponse cinglante issue de l’application de l’article 2052 alinéa 1 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 18 novembre 2016.
Les transactions ont entre les parties l’autorité de la chose jugée en dernier ressort.
Les parties ont conclu une transaction portant accord global qui règle l’ensemble des litiges nés de l’exécution du bail initial.
Dès lors que la validité de cette transaction n’est pas contestée (pour vice de consentement par exemple), il faut en déduire que l’autorité de la chose jugée qui est attachée à cette transaction dont la nullité n’est pas demandée doit rendre irrecevable toute demande formée par le locataire sur le fondement de la clause d’indexation du bail précédent.
Cette décision parait logique.
En effet, sur le plan pratique il est important de protéger les transactions lorsqu’elles ne sont pas atteintes d’une nullité.
La transaction a bien pour objectif de régler définitivement un problème passé.
Il serait mal venu de pouvoir aussi facilement y revenir.
La Cour de cassation a fait donc bonne œuvre en rendant cette décision.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
MEDINA Jean-Luc
Avocat Associé
CDMF avocats , Membres du conseil d'administration
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