Assureur emprunteur: quel remboursement pour les assurés?
Publié le :
19/02/2013
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2013
Une décision du Conseil d'Etat atteste s'il en était besoin qu'un besoin criant d'une action de groupe à la française se fait jour. Il s'agit ici de remboursement de surprimes perçues indument par les banques en lieu et place des assurés.
L'incurie d'une class action préjudiciable?
Par une décision en date du 23 juillet 2012, le Conseil d'Etat avait donné raison à l'Association UFC QUE CHOISIR dans le cadre de son recours, exercé par l'Association dans le seul but de voir la Haute Juridiction Administrative se prononcer sur la légalité de deux arrêtés ministériels de 1994 et 1995, écartant les prêts immobiliers et les prêts à la consommation de l'obligation légale pour les assureurs, dans le cadre de l'assurance emprunteur, de restituer aux assurés les surprimes d'assurances qui n'avaient pas servi à couvrir la réalisation des risques.
Ceci signifie qu'en exécution des deux arrêtés, aujourd'hui jugés illégaux par le Conseil d'Etat, les assureurs ont reversé aux banques, et non aux assurés, le montant des surprimes perçues dans le cadre du contrat d'assurance emprunteur, et ce de manière illégale.
La décision du Conseil d'Etat est lourde de conséquences, dans la mesure où les montants en jeu sont colossaux, puisque la redistribution opérée au bénéfice des banques s'est chiffrée sur la période courant de 1996 à 2007 à 11,5 milliards d'euros pour les prêts immobiliers et 4,5 milliards d'euros pour les crédits à la consommation.
Il est tout à fait compréhensible que de tels montants aient pu être atteints dans la mesure où si par principe, tout emprunteur est libre de souscrire ou pas une assurance emprunteur, il est acquis que les établissements bancaires imposent aux emprunteurs comme condition pour pouvoir emprunter de souscrire une assurance emprunteur, surtout s'il s'agit d'un crédit immobilier.
Tout emprunteur ayant contracté un prêt immobilier, et dans une certaine mesure certains prêts à la consommation, se trouve donc concerné par la question, et dispose aujourd'hui d'un droit à restitution des surprimes perçues indûment par les banques.
Ces surprimes doivent être calculées, ce qui ne sera pas une tâche facile, dans la mesure où la part qui était reversée par les assureurs aux banques correspondait aux surprimes d'assurances qui n'avaient pas servi à couvrir la réalisation des risques.
Ainsi, les quelques 10 millions de personnes ayant contracté un prêt immobilier entre 1996 et 2005, faute de pouvoir avoir accès de manière amiable au bilan des compagnies d'assurances, faute de pouvoir exercer une action de groupe, devront pour l'instant se résoudre à agir seules.
Cette division des actions n'est pas pour déplaire aux banques, dans la mesure où l'attitude de ces dernières, qui ne manqueront pas d'opposer un refus systématique aux demandes de remboursement, permettra de décourager le plus grand nombre.
A cet égard, il faudra nécessairement suivre ce que sera l'attitude du gouvernement s'agissant de la nécessaire évolution de la législation française quant à l'accès aux actions de groupe, depuis longtemps instituées en droit anglo-saxon, sous le nom de «class actions».
Si l'intervention gouvernementale a été sollicitée par les associations de consommateurs, afin d'accélérer le processus pouvant permettre l'autorisation de telles actions, notamment pour les besoins de la mise en œuvre de la redistribution dans le cadre des assurances emprunteurs, il est certain que le lobby financier ne manquera pas de s'activer pour mettre en échec cette redistribution, eu égard aux montants en jeu.
On aura pu d'ailleurs noter que l'agence de notation Moody’s a permis de préciser que la décision rendue par le Conseil d'Etat constituait une menace sérieuse dans la notation des banques et assurances françaises. Ceci constitue un argument de plus pour les banques pour tenter d'infléchir la politique gouvernementale, ou tout du moins pour essayer de limiter l'intervention de l'Etat aux côtés des assurés.
Le silence gardé par le gouvernement en la matière est d'ailleurs retentissant depuis quelques mois.
Il appartiendra donc dans l'attente d'un cadre procédural plus adapté, à chaque assuré de prendre les initiatives procédurales qui s'imposent pour solliciter la restitution des surprimes qui ne pourront être acquises amiablement.
La bataille peut être longue, mais l'enjeu, suivant le montant des prêts, peut-être important, quand on sait que la surfacturation des assurances pouvait parfois atteindre 100%.
Les assurés pourraient ainsi récupérer la moitié de ce qui a été versé au titre de l'assurance pendant la durée du prêt.
De plus, le cadre procédural permettrait de pouvoir contraindre les banques à communiquer l'ensemble des documents permettant de calculer les primes injustement conservées par le prêteur.
POUR ALLER PLUS LOIN:Eurojuris, "Le point sur l'action de groupe avant le projet de loi annoncé pour le premier semestre 2013", 19 décembre 2012
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
DERVILLERS Julien
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