L’exigence de transparence tarifaire des Syndics de copropriété
Publié le :
26/04/2010
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L’arrêté du 19 mars 2010 modifiant l'arrêté du 2 décembre 1986 relatif aux mesures de publicité des prix applicables dans certains secteurs professionnels vient fixer la liste des prestations de syndic couvertes forfaitairement.
Syndics de copropriété: quelques mots sur l’arrêté du 19 mars 2010Aux termes de l’article 29 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 :
« Le contrat de mandat du syndic fixe sa durée, sa date de prise d'effet ainsi que les éléments de détermination de la rémunération du syndic. Il détermine les conditions d'exécution de la mission de ce dernier en conformité avec les dispositions des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965.
La décision qui désigne le syndic et qui approuve le contrat de mandat est votée par l'assemblée générale à la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965. »
Le chemin a été long avant d’en arriver à la rédaction de ce texte, issue du décret n° 2004-479 du 27 mai 2004, s’agissant de la délicate question de la rémunération du Syndic de copropriété, sans que pour autant toutes les difficultés ne soient résolues.
A l’origine, l’Ordonnance du 30 janvier 1945 prévoyait que les honoraires des syndics seraient soumis à la taxation par arrêté préfectoral.
La loi n° 82-526 du 22 juin 1982, dite « loi QUILLIOT », du nom du Ministre de l’Urbanisme et du Logement de l’époque, concernant principalement les rapports entre bailleurs et locataires, augmenta la charge des Syndics de copropriété, sans modifier pour autant leurs conditions de rémunération.
Depuis l’Ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, désormais codifiée aux articles L. 420-1 et suivants du Code de Commerce, et l’arrêté n° 86-63/A du 02 décembre 1986, les conditions de la rémunération du Syndic sont librement négociées et fixées entre celui-ci et le Syndicat des Copropriétaires.
Cet arrêté précise expressément, en son annexe 2, que :
« un décompte détaillé des honoraires auxquels peut prétendre le syndic doit être fourni à l’assemblée générale des copropriétaires et faire ressortir le montant total des honoraires, ainsi que la répartition selon les différents types de rémunération : honoraires de gestion courante et autres honoraires de gestion le cas échéant, assiette des honoraires à percevoir en cas de travaux exceptionnels et autres honoraires pour prestations particulières notamment ».
Sur la base de cet arrêté, ainsi que de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, la pratique eut alors recours à une distinction entre la rémunération du Syndic au titre de sa gestion courante d’une part et la rémunération de ses prestations particulières d’autre part.
Les actes de gestion courante, rémunérés de manière forfaitaire, comprenaient généralement, sans que cette liste ne soit exhaustive et systématique :
- La tenue de l’assemblée générale annuelle et les diverses formalités, tant antérieures que postérieures, y afférentes
- La présence aux heures ouvrables du syndic, voire de l’un de ses collaborateurs
- La tenue de la comptabilité du syndicat
- La souscription des polices d’assurance multirisques et les déclarations de sinistres relatifs aux parties communes non causés par un résident
- Les appels de provisions pour les charges courantes
Le plus souvent, les prestations particulières, quant à elles, étaient fréquemment rémunérées sur la base de vacations horaires, et concernaient notamment :
- Les travaux exceptionnels
- Les assemblées générales extraordinaires
- Les contentieux
- Les études
S’emparant de l’absence de définition de la notion de gestion courante, certains Syndics indélicats ont néanmoins eu la fâcheuse idée de multiplier, pour ne pas dire « gonfler », les prestations particulières, au détriment des actes de gestion courante, afin d’augmenter, parfois de manière non négligeable, leur rémunération. Absence de transparence tarifaire combinée à des prestations particulières parfois floues pouvaient ainsi conduire à faire « exploser » le montant de la rémunération supporté par le Syndicat des copropriétaires.
Ces pratiques amenèrent la Commission des Clauses Abusives à se pencher sur la question, et à émettre le 17 novembre 1995 une recommandation n° 96-01 relative aux contrats proposés par les syndics de copropriété (BOCC 24 janvier 1996), aux termes de laquelle elle préconisait précisément de ne pas « restreindre la notion de gestion courante par l’accumulation de prestations particulières et/ou le recours à la rubrique «divers» ».
Enfin et surtout, le Conseil National de la Consommation rendait le 27 septembre 2007 un avis relatif à l’amélioration de la transparence tarifaire des prestations des syndics de copropriété, particulièrement remarqué. En effet, le Conseil, après avoir stigmatisé le comportement de certains syndics consistant à « réviser, souvent à la baisse, le périmètre des prestations facturées dans le cadre du forfait, au bénéfice des modes de facturation séparée », n’hésitait pas à y définir les notions de « gestion courante » et de « prestations particulières », ce à quoi s’était refusé l’arrêté de 1986. Et le Conseil de préconiser en conclusion l’adoption d’un arrêté ministériel si ses recommandations n’étaient pas suivies.
Une enquête menée par la DGCCRF début 2008 révélait que dans l’ensemble, les nouveaux contrats de syndic se conformaient à ces prescriptions, lesquels contrats reprenant pour l’essentiel les dispositions du modèle de contrat-type rédigé conjointement par la CNAB, la FNAIM et l’UNIT en suite de l’avis rendu par le Conseil National de la Consommation.
La pratique se trouvait ensuite partiellement consacrée par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, qui introduisait un article 18-1 A dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, lequel distingue désormais clairement, en matière de travaux, entre les honoraires de gestion courante et ceux relatifs aux autres prestations.
C’est donc de manière quelque peu surprenante pour les professionnels qu’a été publié récemment l’arrêté du 19 mars 2010 modifiant l'arrêté du 2 décembre 1986 relatif aux mesures de publicité des prix applicables dans certains secteurs professionnels (JORF n° 68, 21 mars 2010, p. 5673) qui vient fixer la liste des prestations de syndic couvertes forfaitairement.
Il est exact que lors des Assises de la Consommation qui s’étaient tenues en octobre 2009, le Secrétaire d’Etat chargé du Commerce, de l’Artisanat, des PME, du Tourisme, des Services et de la Consommation avait fait part de son intention d’édicter un tel arrêté, mais des doutes existaient quant aux suites qui seraient effectivement réservées à ce qui avait pu être alors interprété comme un effet d’annonce.
Quoi qu’il en soit, l’édiction de cet arrêté devrait mettre fin définitivement aux contentieux ayant pu se poser. Le texte complète l’arrêté du 02 décembre 1986 en prévoyant que :
« Les opérations effectuées par les administrateurs d'immeuble ou syndics de copropriété qui figurent dans le tableau annexe relèvent de la gestion courante. Cette annexe énumère la liste minimale des prestations incluses dans le forfait annuel. Toute prestation particulière doit figurer explicitement en tant que telle dans le contrat de syndic. Le contenu des prestations particulières doit être défini avec précision dans les rubriques correspondantes figurant dans le contrat de syndic ».
Est ainsi annexée à cet arrêté une « liste minimale des prestations de gestion courante », qui reprend en réalité la liste proposée par le Conseil National de la Consommation dans son avis du 27 septembre 2007.
Toutes les prestations figurant dans cette annexe relèvent donc désormais obligatoirement de la gestion courante ; elles sont regroupées en cinq grandes catégories :
- L’assemblée générale annuelle
- La comptabilité générale de la copropriété
- L’administration et la gestion de la copropriété en conformité avec le règlement de copropriété
- Les assurances
- La gestion du personnel
Le texte détaille ensuite, pour chacune des catégories, les prestations incluses dans le forfait, ci-après reproduites :
« LISTE MINIMALE DES PRESTATIONS DE GESTION COURANTE
Prestations invariables
I. - ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE
I-1. Elaboration et envoi de la convocation, des documents à joindre à la convocation et des projets de résolutions (*).
I-2. Réunion du conseil syndical précédant l'assemblée générale. ― Objet de la réunion.
I-2.1. Etablissement de l'ordre du jour.
I-2.2. Présence du syndic ou de son représentant [il convient de préciser expressément la durée contractuelle prévue comme incluse dans le forfait ainsi que les jours et les plages horaires convenus].
I-3. Mise à disposition de tous les copropriétaires des différentes pièces comptables et justificatives dans les conditions prévues à l'article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965.
I-4. Tenue de l'assemblée générale.
I-4.1. Etablissement de la feuille de présence, émargement, vérification des voix et des pouvoirs.
I-4.2. Tenue du registre des procès-verbaux.
I-4.3. Procès-verbal : rédaction du procès-verbal lorsque le syndic est élu secrétaire.
I-4.4. Envoi et notification du procès-verbal (*).
I-4.5. Affichage dans les parties communes de la copropriété d'un procès-verbal abrégé mentionnant les résolutions relatives à l'entretien de la copropriété et aux travaux.
I-4.6. Présence du syndic ou de son représentant [il convient de préciser expressément la durée contractuelle prévue comme incluse dans le forfait ainsi que les jours et les plages horaires convenus].
II. ― COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DE LA COPROPRIÉTÉ
II-1. Etablissement du compte de gestion générale et des annexes du syndicat des copropriétaires.
II-1.1. Présentation des comptes en conformité avec la réglementation en vigueur.
II-1.2. Etablissement du budget prévisionnel, en collaboration avec le conseil syndical.
II-2. Compte copropriétaires.
II-2.1. Etablissement et mise à jour de la liste des copropriétaires.
II-2.2. Tenue des comptes des copropriétaires.
II-2.3. Appel des provisions sur budget prévisionnel (*).
II-2.4. Imputations des consommations individuelles de fluide ou d'énergie lorsque les compteurs sont déjà installés lors de la désignation du syndic.
II-3. Compte fournisseurs. ― Factures.
II-3.1. Vérification et paiement des factures.
II-4. Remise au syndic successeur de l'état financier, de la totalité des fonds, de l'état des comptes des copropriétaires et des comptes du syndicat.
II-5. Compte bancaire séparé ou, le cas échéant, compte du cabinet en cas de dispense (possibilité de prix différencié selon le choix de la copropriété).
III. - ADMINISTRATION ET GESTION DE LA COPROPRIÉTÉ EN CONFORMITÉ AVEC LE RÈGLEMENT DE COPROPRIÉTÉ
III-1. Archives du syndicat.
III-1.1. Détention :
Détention, conservation des archives utiles dans le cadre de la gestion courante de l'immeuble [il convient de préciser expressément leur nature, leur volume et leur ancienneté], notamment les plans, le règlement de copropriété, l'état de répartition des charges, l'état de division, les procès-verbaux des assemblées générales, les contrats de travail des préposés du syndicat, les contrats d'assurance de l'immeuble et documents nécessaires pour leur mise en œuvre, les documents et décisions de justice relatifs à l'immeuble dont les délais de contestation ne sont pas révolus, les contrats d'entretien et de maintenance des équipements communs, ainsi que toute pièce administrative datant de moins de deux ans.
III-1.2. Transmission des archives au syndic successeur.
III-1.3. Elaboration et transmission au conseil syndical du bordereau récapitulatif des archives transmises au syndic successeur.
III-2. Conseil syndical. ― Obligations administratives.
III-2.1. Mise à disposition et communication au conseil syndical de toutes pièces ou documents se rapportant à la gestion du syndicat (*).
III-2.2. Recueil des avis écrits du conseil syndical lorsque sa consultation est obligatoire.
III-3. Entretien et maintenance.
III-3.1. Visite de la copropriété dans les conditions définies au contrat (nombre et modalités à préciser).
III-3.2. Négociation, passation, suivi des marchés des prestataires et gestion des contrats à l'échéance dans le cadre du budget prévisionnel.
III-3.3. Gestion de tous les diagnostics/dossiers obligatoires.
III-3.4. Carnet d'entretien : établissement et mise à jour pour les informations mentionnées aux articles 3 et 4 du décret n° 2001-477 du 30 mai 2001.
III-3.5. En vue de la consultation en assemblée générale, appel d'offres, étude des devis et mise en concurrence résultant de la demande d'une pluralité de devis ou de l'établissement d'un devis descriptif soumis à l'évaluation de plusieurs entreprises lorsque celle-ci est obligatoire dans le cadre des travaux de maintenance définis à l'article 45 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967.
III-3.6. Gestion des travaux d'entretien et de maintenance.
IV. - ASSURANCES
IV-1. Souscription des polices d'assurance au nom du syndicat et avec l'accord préalable du syndicat.
IV-2. Déclaration des sinistres concernant :
― les parties communes ;
― les parties privatives lorsque le dommage a sa source dans les parties communes.
IV-3. Règlement des indemnités aux bénéficiaires.
V. ― GESTION DU PERSONNEL
V-1. Recherche et entretien préalable (les coûts de la publication des annonces ne sont pas compris) (**).
V-2. Etablissement du contrat de travail et, le cas échéant, de ses avenants (**).
V-3. Paiement du salaire et de toute indemnité, prime... due au salarié (**).
V-4. Tenue du livre des salaires et édition des bulletins de paie (**).
V-5. Déclarations et paiement aux organismes fiscaux et sociaux (**).
V-6. Attestations et déclarations obligatoires (**).
V-7. Gestion des remplacements pendant les congés, arrêts maladie et maternité (**).
V-8. Mise en place du DUERSST et mise à jour (**).
V-9. Gestion de la formation du personnel du syndicat (**).
V-I. Divers.
V-I.1. Calcul des intérêts légaux au profit du syndicat.
(*) Prestations hors frais de tirages, d'affranchissements et d'acheminements. (**) Prestations effectuées de façon habituelle si présence de personnel du syndicat des copropriétaires. »
Toute autre prestation ne figurant pas dans cette liste peut être incluse dans ce forfait. Il est néanmoins probable qu’en pratique elle relèvera de la catégorie des prestations particulières, et devra donc être indiquée en tant que telle dans le contrat, et être définie avec précision.
Au final, ce texte ne constitue pas une révolution, puisqu’il ne comporte pas de dispositions innovantes par rapport à la pratique existante majoritaire. Il devrait néanmoins permettre de tarir le contentieux ayant pu exister jusqu’à présent, tout au moins pour les nouveaux contrats conclus à compter du 1er juillet 2010, date d’entrée en vigueur de l’arrêté, ce qui laisse deux mois aux professionnels pour adapter, en tant que de besoin, leurs futurs contrats. Les contrats en cours, en revanche, ne sont pas affectés par l’arrêté, mais il ne fait guère de doute qu’en cas de contentieux, les juridictions n’hésiteront pas à interpréter les dispositions contractuelles à la lumière de ce nouvel arrêté…
Cet article a été rédigé par Thibaut CRASNAULT
Il n'engage que son auteur.
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