Rejet du recours formé par l’ANEL et l’AMF contre l’ordonnance du 6 avril 2022 relative au recul du trait de côte : R.A.S. selon le Conseil d’Etat
Publié le :
23/10/2023
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Le Conseil d’Etat, dans une décision rendue le 13 octobre 2023 n°464202, valide la légalité de l’ordonnance du 6 avril 2022 relative à l’aménagement durable des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte. Il avait été saisi d’un recours pour excès de pouvoir formé par l’ANEL et l’AMF.Pour rappel, cette ordonnance adoptée sur le fondement de la Loi Climat et Résilience du 22 août 2021 prévoit de nouveaux dispositifs permettant aux communes menacées d’adapter leur politique d’aménagement au risque d’érosion côtière. Ce nouveau régime s’applique sur le territoire des 242 communes littorales listées par le décret du 31 juillet 2023.
L’ANEL et l’AMF ont formé un recours pour excès de pouvoir afin d’obtenir l’annulation de l’ordonnance. Les associations ont soulevé plusieurs points, tous écartés par le Conseil d’Etat.
Une question prioritaire de constitutionnalité non transmise
1. Les associations soutenaient notamment l’inconstitutionnalité du nouveau droit de préemption en ce qu’il méconnaitrait le principe de libre administration des collectivités territoriales, le législateur n’ayant pas prévu de ressources particulières pour que les communes puissent le mettre en œuvre.Selon le Conseil d’Etat, ce grief ne présente pas de caractère sérieux et doit être écarté : l’usage de ce droit n’étant qu’« une simple possibilité », les communes pourront décider de le mettre en œuvre en prenant en compte les ressources dont elles disposent.
Pourtant, le recul du trait de côte constitue bien un phénomène inexorable auquel les communes devront faire face, par le biais du droit de préemption notamment, quelles que soit leurs ressources…
2. En outre, les associations ont fait valoir que la subordination des opérations de relocalisation à « l’accord de l’autorité administrative compétente de l’Etat » méconnaissait le principe de libre administration des collectivités territoriales en ce qu’elle instaurerait une tutelle de l’Etat en matière d’urbanisme.
Le Conseil d’Etat justifie le pouvoir de l’Etat de s’opposer aux éventuelles relocalisations par « les nécessités de protection de l’espace particulièrement sensible que constitue le littoral ».
Encore une fois, l’Etat désire maintenir son monopole de la protection de l’environnement, au détriment de la gestion territorialisée et avisée des collectivités.
La QPC soulevée n’a pas passé le filtre du Conseil d’Etat et ne sera donc pas renvoyée au Conseil Constitutionnel.
Le recours pour excès de pouvoir rejeté
Le Conseil d’Etat rejette les moyens tirés d’une irrégularité de la procédure d’élaboration de l’ordonnance, d’incompétence ou encore de la méconnaissance du principe d’égalité. Il valide également la légalité du nouveau bail réel d’adaptation : il ne fait pas obstacle au principe pollueur-payeur car il est prévu que le coût de la renaturation et de dépollution du terrain pourra être pris en charge par le preneur dans le calcul du montant de la redevance.La requête de l’ANEL et de l’AMF est alors rejetée.
Dans un communiqué de presse publié au moment de la formation du recours, l’Association des Maires de France exprimait son mécontentement : « Les communes littorales attendent depuis longtemps les outils et ressources nécessaires à leur adaptation à l’érosion côtière afin d’éviter les situations juridiques et humaines inextricables révélées par le cas emblématique de l’immeuble Le Signal à Soulac-sur-Mer. (…) Les nouveaux outils que propose l’ordonnance ne répondent pas à cette attente, ni du point de vue de la sécurité juridique, ni sur celui de la garantie des ressources.»
Yannick Moreau, maire des Sables d’Olonne et président de l’Association des Elus des Littoraux (ANEL) appuyait : « On nous demande de signer un chèque en blanc, d’endosser les responsabilités de gestion du trait de côte et d’assumer seuls la charge financière ».
Le Conseil d’Etat a validé entièrement l’ordonnance du 6 avril 2022. Les collectivités devront donc faire avec…
Cet article a été rédigé par Julie Gervais de LAFOND, Étudiante alternante au sein du cabinet DROUINEAU 1927- Master 2 Droit public. Il n'engage que son auteur.
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