Travail forcé: condamnation de la France par la CEDH

Publié le : 16/10/2012 16 octobre oct. 10 2012

Dans un arrêt du 11 octobre 2012, la CEDH condamne la France pour violation de son obligation de mettre en place un cadre législatif et administratif permettant de lutter efficacement contre la servitude et le travail forcé.

Lutte contre la servitude et le travail forcéLa Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) avait été saisie en 2009 par deux Françaises originaires du Burundi, arrivées en France en 1994 et 1995 et élevées par leurs oncle et tante après la mort de leurs parents, tués dans la guerre civile.

Les deux orphelines vivaient au sous-sol du pavillon de leurs tuteurs à Ville d'Avray, près de Paris, avec leurs sept enfants, dont l'un était handicapé. Elles s'occupaient de toutes les tâches ménagères et domestiques, sans être payées et sous la menace constante d'être renvoyées au Burundi.

En 2007, le tribunal correctionnel de Nanterre avait déclaré les époux coupables, avant de disculper en appel le mari, ancien ministre du gouvernement burundais et fonctionnaire à l'UNESCO.

Pour la CEDH, "le travail forcé ou obligatoire", désigne "un travail exigé sous la menace d'une peine quelconque" et "contraire à la volonté de l'intéressé, pour lequel celui-ci ne s'est pas offert de son plein gré".

Dans sa décision rendue le 11 octobre 2012, la cour relève que le travail demandé à l'aînée ne s'apparentait pas à ce qui peut être exigé légitimement au titre de l'entraide familiale ou de la cohabitation, mais au contraire, était tel que sans son aide les époux auraient dû recourir aux services d'une employée de maison rémunérée.
La menace d'un renvoi au Burundi constituait bien par ailleurs la "menace d'une peine quelconque". Enfin, sans qualification professionnelle, cette situation ayant duré quatre ans, la cour estime que cette jeune fille a été maintenue en état de servitude.

L'État français est donc condamné sur le fondement de l'article 4 de la Convention (interdiction de l'esclavage et du travail forcé), les dispositions du Code pénal en vigueur au moment des faits et leur interprétation n'ayant pas assuré une protection concrète et efficace de la victime, d'une part, la Cour de cassation n'ayant été saisie que du volet civil de l'affaire, en l'absence de pourvoi du procureur général à l'encontre de l'arrêt du 29 juin 2009, d'autre part.


V. MEREGHETTI-FILLIEUX

Cet article n'engage que son auteur.

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