Dénomination sociale, nom patronymique et marque
Publié le :
13/09/2010
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2010
Les textes communautaires comme nationaux consacrent la même solution selon laquelle un nom patronymique peut constituer une marquer ou une dénomination sociale.
L’exploitation d’un nom patronymique à titre de marque ou de dénomination sociale
Les textes communautaires (1) comme nationaux (2) consacrent la même solution selon laquelle un nom patronymique peut constituer une marquer ou une dénomination sociale.
Le nom patronymique est le mode d’identification des individus, un élément de la personnalité, qui est donc, à ce titre, incessible et imprescriptible.
La dénomination sociale est l’appellation sous laquelle une société commerciale est inscrite au RCS tandis que la marque est définie par le code de la Propriété Intellectuelle (3) comme étant « un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale ».
Le débat qui oppose la création d’une dénomination sociale ou d’une marque au nom patronymique est en grande partie traité par la jurisprudence de la chambre commerciale qui définit les conditions d’application des dispositions du CPI.
Est on libre d’utiliser un nom patronymique (le sien ou celui d’un autre) à titre commercial ? Il paraît évident que l’utilisation de son nom ne peut être interdite à son titulaire. Toutefois, ce droit n’est pas absolu.
S’agissant de l’exploitation d’un nom patronymique, il est indispensable de distinguer l’acquisition des droits portant sur le nom (I) et son exploitation à titre de marque ou de dénomination sociale (II).
I. Sur l’acquisition des droits d’un nom patronymique (le sien ou celui d’un autre)
Est on libre d’utiliser dans tous les cas son propre nom patronymique ou celui d’un tiers ?
En principe, chacun a le droit d’utiliser son propre nom patronymique comme nom commercial, dénomination social ou marque s’il n’existe aucun usage commercial antérieur de ce nom pour la même activité.
En revanche, s’il existe un tel usage, ce principe peut être remis en cause.
1) S’agissant de son propre nom
Si le nom est déjà utilisé par un tiers dans un secteur d’activité semblable, son utilisation commerciale ne doit pas porter atteinte aux droits de ce tiers. Si cet usage crée un risque de confusion dans l’esprit du public, il sera soit interdit soit réglementé.
Des mesures de réglementations destinées à rendre les deux noms commerciaux distincts sont souvent ordonnées pour exclure tout risque de confusion : Société Poilâne c/ Max Poilâne (4), « le nom Poilâne étant antérieurement utilisé par une société de son nom, les tribunaux ont toutefois n’ont autorisé Max Poilane a faire un usage commercial de son nom, tant à titre de marque que de dénomination sociale, qu’à condition de le faire précéder immédiatement du prénom Max, sur la même ligne et avec les mêmes caractères de mêmes dimensions, couleurs et tonalité, en ajoutant immédiatement en dessous en caractères lisibles l’adresse de l’établissement ».
La Cour précise dans une affaire opposant les mêmes parties qu’une marque ne peut pas, « pour étendre son champ de protection » essayer d’obtenir une meilleure distinction entre des signes proches pour limiter les modalités d’usage d’une autre marque (5).
Si le choix d’un patronyme est « sincère », c’est à dire s’il n’est pas produit de mauvaise foi, l’usage sera en principe réglementé. Mais si le risque de confusion est trop important, il sera interdit.
Plus le nom antérieur sera connu, plus le risque de confusion persistera malgré les précautions prises.
Enfin, lorsque le nom commercial utilisé le premier est notoire, son emploi par un homonyme même dans un secteur différent pourra être considéré par le public comme une diversification de l’activité de l’exploitant du nom notoire. Il sera donc interdit car considéré comme déloyal : CHANEL c/ Jean Paul CHANEL, D.ARPELS c/ VAN CLEFS AND ARPELS, Tf1FFINDE GIVENCHYs c/ GIVENCHY.
Secteur d'activité similaireSecteur d'activité différentConditions d'usage autoriséUsage sincère
Ajout d'éléments distinctifs
Aucun risque de confusionUsage interditUsage déloyal
Risque de confusion
Nom notoirement connu
2) S’agissant du nom d’autrui
Le dépôt d’un nom patronymique qui n’est pas celui du déposant est en principe possible, sauf s’il coexiste avec celui d’un tiers.
Dans ce cas, le tiers peut s’opposer au dépôt de la dénomination sociale ou de la marque si celui-ci porte atteinte à ses droits à deux conditions :
- Qu’il y ait un risque de confusion dans l’esprit du public (6) (homonymie (7) ).
- Que cette confusion lui soit préjudiciable.
II. Sur l’exploitation d’un nom patronymique à titre de marque ou de dénomination sociale
Dans le cadre de l’exploitation, il est indispensable de distinguer l’exploitation à titre de dénomination sociale et celle à titre de marque :
- S’agissant de l’exploitation du nom à titre de dénomination sociale, le dépôt du nom à titre commercial nécessite la conclusion d’un accord entre le titulaire du nom et la société exploitant ledit nom. L’accord portera sur l’utilisation de ce nom comme dénomination sociale ou nom commercial et sera intégré dans les statuts (8).La Cour ne conditionne pas la validité de l’accord à l’exigence d’une clause spéciale (9). La portée de la convention portant sur la dénomination sociale est strictement limitée au mode d’exploitation visé au contrat, le titulaire du nom étant supposé s’être réservé tout mode d’exploitation non expressément visé.
- S’agissant de l’exploitation du nom à titre de marque, tout dépend de la nature du nom. Si le nom est notoirement connu et la notoriété résulte de l’activité personnelle du titulaire du nom, son utilisation peut résulter soit de l’accord du titulaire soit de la renonciation expresse du titulaire à ses droits patrimoniaux (10). Toutefois, si la notoriété résulte de la personne morale identifiée sous le nom, alors le nom n’est pas objet des droits patrimoniaux si bien qu’un autre peut exploiter le signe sous différentes formes et notamment l’exploiter comme marque (11).
Tableau récapitulatif sur l’exploitation du nom patronymique
A titre de marque A titre de dénomination socialeNom méconnu
Régime juridique généralNom notoirement connu sur le territoire national (12)
Activité personnelle du titulaireActivité de la personne moralePrincipe et limiteExploitation conditionnée à:
- L'accord du titulaire
- La renonciation expresse du titulaire à ses droits patrimoniaux
(conditions alternatives)
Exploitation possible car le nom n'est pas objet des droits patrimoniauxAccord intégré aux statuts et portant sur l'utilisation du nom
Exploitation limitée aux modes d'exploitation visés dans la convention
Index:
(1) Article 2 de la Directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 et article 4 du Règlement 40/94 du 20 décembre 1993
(2) Article 1er de la loi du 31 décembre 1964
(3) Article L711-1 du code de la Propriété Intellectuelle
(4) CA Paris, 9 décembre 1992
(5) Com, 7 juillet 2009, N° 08-19.185
(6) Com, 31 janvier 2006, Inès de la Fressange
(7) CA Paris, 18 novembre 2009, Andriveau
(8) Com, 12 mars 1985, Bordas.
(9) Com, 13 juin 1995, Petrossian
(10) Com, 6 mai 2003, Ducasse
(11) Traité de droit de la PI. J. PASSA
(12) Com, 24 juin 2008, Beau
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © v2 - Fotolia.com
Auteur
HERPE François
Avocat Associé
CORNET, VINCENT, SEGUREL PARIS, Membres du Bureau, Membres du conseil d'administration
PARIS (75)
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