Responsabilité médicale : la reconnaissance d’une faute doit s’appuyer sur des éléments médicaux probants
Publié le :
18/01/2023
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2023
Cass. Chambre civile 1, 14 décembre 2022, 21-22.037
En 2003, un chirurgien a posé une prothèse de hanche sur un homme de 64 ans en surcharge pondérale.
Dans les deux mois qui ont suivi la pose de la prothèse, le patient a été victime de 4 luxations de la hanche.
Le chirurgien a par conséquent changé la tête céramique de la prothèse et posé un dispositif spécial anti-luxation.
Quatre ans après, le patient se plaignant de douleurs à la hanche, a de nouveau été opéré pour changer sa prothèse.
A l’issue de deux expertises médicales, le patient a assigné le chirurgien, l’hôpital et les deux fabricants de la prothèse de hanche en responsabilité devant le Tribunal Judiciaire de Bayonne, puis devant la Cour d’appel de Pau.
Pour rappel, conformément à l’article L.1142-1 du Code de la santé publique « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code , ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. »
Les deux expertises médicales avaient retenu (1) que la prothèse de hanche n’était pas défectueuse et (2) l’absence de faute du chirurgien.
Pourtant, si la Cour d’appel de Pau a exonéré les fabricants de la prothèse de toute responsabilité en l’absence de démonstration d’une quelconque défectuosité, elle a jugé que « le chirurgien a[vait] néanmoins commis une faute en ne tirant pas les conséquences morphologiques de son patient […] qui commandaient d’implanter un dispositif anti-luxation » et l’a condamné à indemniser le patient.
Le chirurgien s’est alors pourvu en cassation.
Le 14 décembre 2022, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Pau au motif qu’elle n’avait pas donné de base légale à sa décision en ne précisant pas sur quels éléments médicaux elle se fondait pour parvenir à cette conclusion contraire à celles des expertises médicales réalisées.
Par conséquent, afin de retenir une faute médicale, les juges doivent impérativement se fonder sur des éléments médicaux probants et médicaux.
La Cour de cassation n’a en l’espèce pas souhaité uniformiser le traitement des victimes du secteur privé ou du secteur public en matière de responsabilité médicale.
Les victimes du secteur privé, qui s’adressent aux juridictions civiles, sont tenues de démontrer l’existence d’une faute caractérisée afin de voir engager la responsabilité des professionnels de santé, même lorsque le professionnel de santé à recours à un produit de santé.
A l’inverse, les victimes du secteur public, qui s’adressent aux juridictions administratives, n’auront qu’à démontrer une défaillance du dispositif médical afin que la responsabilité du service public hospitalier soit retenue.
Cet article n'engage que son auteur.
Auteur
VUCHER-BONDET Aurélie
Avocate Associée
CORNET, VINCENT, SEGUREL PARIS
PARIS (75)
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